Sophie Gail naît en 1775 à Paris, fille de Claude-François Garre, docteur en médecine et chirurgien du roi, anobli en 1785, et d'Adélaïde Colloz, une aristocrate qui avait reçu, aux dires de son mari, « une instruction au-dessus de son sexe ». Ses parents, très mélomanes, apprécient notamment la musique de chambre. Elle apprend le piano et le chant, pratique l'improvisation et publie des romances dès 1790. Elle épouse en 1795 l’helléniste Jean-Baptiste Gail et met au monde la même année son premier fils, Jean-François ; les époux divorcent en 1801. Héritière des salonnières de l'Ancien Régime, Sophie Gail mène une vie libre ; trois autres fils, de trois pères différents, naissent entre 1800 et 1805. Sa fortune n'ayant pas résisté aux tourbillons de la Révolution, elle gagne sa vie comme pianiste et cantatrice, publie des romances, compose des airs pour le théâtre et donne un opéra en un acte sur un théâtre de société. Elle décide alors d'approfondir sa formation à la composition auprès de Fétis, Perne, Neukomm, Catel et Paër. Elle donne le 27 mars 1813 à l’Opéra-Comique un ouvrage en un acte, Les Deux Jaloux, sur un livret de Jean-Baptiste-Charles Vial, qui rencontre un grand succès et restera au répertoire de ce théâtre jusqu'en 1839, totalisant plus de trois cents représentations. Ses deux ouvrages suivants pour l'Opéra-Comique, Mademoiselle de Launay à la Bastille (1813) et La Méprise (1814), sont des échecs, comme Angela ou l’Atelier de Jean Cousin (1814), une collaboration avec François-Adrien Boieldieu. Elle renoue avec le succès avec la création à l'Opéra-Comique, le 2 avril 1818, de La Sérénade, composé en partie avec Manuel García sur un livret de Sophie Gay, la romancière amie de Balzac et mère de Delphine de Girardin. Elle travaillait à de nouveaux ouvrages lorsqu’elle succombe à une maladie pulmonaire le 24 juillet 1819, à quarante-trois ans. Adrien de La Fage la saluait encore en 1847 comme « la seule compositrice qui ait obtenu au théâtre un véritable succès ».

– Florence Launay –