France
Comtesse de Die (active au début du XIIIe siècle)

Le peu que l’on connaît de la biographie de la comtesse de Die nous est donné par sa vida, conservée dans quatre manuscrits. Si l’on en croit ce bref texte, celle qui était femme de Guilhem de Poitiers est tombée amoureuse de Raimbaut d’Orange et a écrit « maintes bonnes chansons ». Si ces noms sont connus, ils interrogent à bien des égards. On a longtemps cru que le Guilhem de Poitiers dont il est question était Guilhem II, comte de Valentinois de 1158 à 1189, ce qui a ancré l’idée que la trobairitz était Beatriz, fille de Guigues VI, dauphin du Viennois. Le prénom a, de fait, traversé le temps sans la moindre légitimité. Selon les recherches les plus récentes, pas moins de cinq personnages sont possibles pour endosser le rôle du mari de la comtesse. Une certaine Dia Mondragon, contemporaine de Raimbaut III d’Orange aurait même pu être la comtesse, le « de » ajouté dans la rubrique (le fait n’était pas rare) faisant de la comtesse Die une comtesse de Die. Peut-être, enfin, était-elle fille de Marguerite de Bourgogne. Ledit Guilhem de Poitiers aurait alors été un bâtard, comte de Vermandois, marié à une dame dont le fils était comte de Die.

Quant au Raimbaut d’Orange dont elle se serait éprise, il n’est très probablement pas le troubadour connu sans quoi il y a fort à parier pour que ce détail ait été précisé, ne serait-ce que dans la propre vida du poète compositeur. Il serait plutôt l’un de ses neveux ou petits-neveux et, ici encore, la liste est longue. L’erreur viendrait de l’analogie entre les incipits de deux chansons : la canso Estat ai en greu consirier de la comtesse et la tenso dialoguée Amics, en gran consirier, généralement attribuée à Raimbaut d’Orange. Les similitudes entre les deux premiers vers auraient suggéré au biographe de la vida que l’un était inspiré de l’autre (chose fréquente au Moyen Âge) et que cette inspiration était la preuve d’un amour partagé. Quelques chercheurs penchent toujours pour une attribution de la tenso à la comtesse, à la lumière de cette ressemblance.

La comtesse est l’autrice reconnue de quatre cansos dont l’une d’entre elles est à la fois conservée dans quatorze manuscrits, record pour l’époque, et notée. C’est la seule dans ce cas pour l’ensemble du corpus féminin de langue d’oc. Paradoxe, le chansonnier conservant la musique d’A chantar m’er de so qu’ieu non volria est un manuscrit de trouvères (Paris, BnF, fr. 844, fol. 204r) et la chanson y est conservée dans une langue à mi-chemin entre oc et oïl. Particulièrement directe, la trobairitz exprime une grande variété de sentiments dans ses poèmes : joie et gaieté de l’amour, espoir de tenir un jour son ami « un ser en [ses] bratz nus » (un soir nu entre ses bras), désespoir d’avoir été trompée ; elle y vilipende les jaloux et les « fals lausengiers », ces espions qui renseignent les maris jaloux, citant héros et héroïnes de roman à l’appui de ses idées.

– Anne Ibos-Augé (IReMus – Paris, Sorbonne Université) –
Contributeur : Présence Compositrices - dernière mise à jour 16 décembre 2024

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